Au coeur de Kaboul

Par Saphoo

Donner mon avis, m’apparait difficile, étant partagée par deux sentiments, l’un de modération et l’autre d’admiration.

Je m’explique : je ne suis pas une amatrice de polar, thriller enfin donnez le nom que vous voulez à ce genre de littérature qui tourne autour du crime, pourtant j’aime parfois en lire pour parcourir les méandres de l’intrigue, la subtilité des enquêteurs, une façon aussi de diversifier mes lectures.

Malheureusement je n’y trouve jamais mon plaisir premier pour la lecture : la poésie, les mots, les belles phrases, la douceur des métaphores, un style ciselé, la légèreté de la plume, de la réflexion,  l’originalité d’une architecture…

Il me semble que les polars, sont tous bâtis sous un même format, dans le seul but de nous emporter uniquement par l’intrigue, le suspense, les fausses frayeurs pour au final connaître : qui a tué qui ? Si je devais être franche, je dirais : aucun intérêt !

Mais voilà ! Il y a l’autre part de ma personne qui reste pantois devant ces pages qui nous font suer dans le bon sens du terme, je tiens à le préciser ! Ce fut le cas pour cet homme de Kaboul, chapeau bas à l’auteur ! Combien on ressent la masse de travail en amont pour aboutir à une telle histoire ;  à la fois, un polar, une étude d’un peuple déchiré, une affreuse affaire de magouille d’argent détourné, le courage de deux hommes qui vont au risque de leur vie, combattre jusqu’au bout pour démanteler tout ce petit monde bien véreux.

J’ai apprécié découvrir Kaboul et le peuple afghan, leurs traditions et leurs coutumes même si on ne peut que déplorer certaines pratiques et constater la piètre condition féminine et de tout un peuple,  des absurdités au nom d’une soi-disant religion ne serait-ce pas plutôt au nom de la bêtise humaine.

Le contraste entre les deux pays où se déroule l’intrigue est assez intéressant et permet également un dépaysement total, une cassure que j’ai appréciée dans ce climat malsain de Kaboul, les conditions difficiles et moyenâgeuses des habitants me pesaient par moments.  Je crois que cette astuce fut plus que judicieuse.

Ce roman est intéressant pour cette partie historique et géographique, de fusionner une histoire policière dans deux contextes opposés qui finissent par se rejoindre, pour la raison qui vous sera dévoilée en fin de roman. Voilà aussi le piège des polars, nous sommes finalement condamnés à les lire entièrement si on veut apprécier toute la structure fine ou moins fine de camoufler la vraie raison d’un crime. Suspendre tout au long des mots le lecteur en haleine et lui révéler qu’à l’ultime chapitre tout le cœur qui a fait battre les tambours durant X pages.

Les personnages sont parfaitement bien travaillés, crédibles dans leurs actions et leurs pensées, et l’auteur a su par le biais de ces personnages nous exposer en parallèle une certaine réflexion sur la condition humaine, cette soumission que ça soit pour la femme afghane, de l’homme par l’homme, d’un pays par un pouvoir quelconque, d’un salarié par son entreprise, il a su démontrer que tout a chacun, nous sommes la marionnette de quelqu’un ! J’ai beaucoup aimé le personnage de “ Oussama Kandar”, un homme intègre qui a su resté digne, sachant allier tradition et respect de l’être humain.

Au final, j’ai lu ce livre sans trouver le plaisir des mots dont je suis friande pour autant le style reste agréable. Toutefois j’ai parfaitement apprécié la qualité du roman pour cette peinture d’un pays mal connu, et l’histoire bien menée et équilibrée, même si je dois déplorer des passages qui m’ont semblé quelque peu tirés par les cheveux, mais ça reste infime et certainement indispensable pour donner les couleurs d’un bon polar typiquement masculin en son genre avec beaucoup d'actions et de rebondissements.

Je pense, ne pas me tromper en qualifiant ce polar : d’original ! se démarquant largement des polars dont nous avons l’habitude de croiser par sa dimension spatiale et géopolitique, tout en ressentant l’implication et la volonté de l’auteur à nous livrer un roman qui suscite de l’indignation certes mais aussi de la curiosité et de l’intérêt sur cette partie du monde. L’auteur a su transmettre à travers les pages, une certaine admiration pour ce pays qui semble de toute beauté prise dans un piège horrible où la population se meurt.

Comme un cri, un appel, nous avons envie de découvrir un peu plus profondément l’Afghanistan autrement qu’à travers ces guerres incessantes.

A souhaiter qu’un jour prochain, ce pays trouvera la paix et son peuple,  la décence que tout être humain est en droit d’attendre.